Découverte : le monde arabe et les Vikings se seraient côtoyés dès le 9e siècle

 Des archéologues ont découvert une bague gravée de l’inscription “Pour/à Allah” dans la tombe d’une femme viking à Birka, en Suède. S’il demeure impossible de déterminer la façon dont la défunte s’est procurée le bijou, ce dernier pourrait bien être la preuve que les vikings et le monde arabe ont très tôt entretenu des liens, modifiant ainsi considérablement nos connaissances sur ce pan de l’histoire médiévale.

(photo : Christer Åhlin/SHMM (the Swedish History Museum)
 (photo : Christer Åhlin/SHMM (the Swedish History Museum))

Nous sommes au 9e siècle. Le village de Birka est alors un centre de commerce et d’échange majeur en Scandinavie. Une femme, jouissant vraisemblablement d’un rang social élevé, vient de décéder. Le jour de son enterrement, elle est revêtue d’une robe typique des sociétés scandinaves de l’époque. A ses côtés, la présence de bijoux (dont plusieurs broches traditionnelles et une paire de ciseaux) ne laisse pas de place au doute, il s’agit d’une viking.

Elle porte également au doigt une bague en alliage d’argent. A première vue, rien de bien surprenant quand on sait que les vikings ont toujours préféré l’argent à l’or. Pourtant, le bijou a quelque chose d’atypique. Cela tient-il à l’étrange pierre aux reflets violets dont elle est ornée ? Ou bien peut-être est-ce dû aux étranges caractères qui y sont gravés ?

Il aura fallu attendre plus de cent ans après la découverte de la tombe par le célèbre archéologue suédois Hjalmar Stolpe pour qu’une équipe de chercheurs de l’université de Stockholm ne révèle l’ampleur de cette découverte dans une étude parue en début d’année dans la revue Scanning.

Les auteurs y exposent plusieurs révélations de taille. Tout d’abord, la pierre précieuse ornant le bijou n’a rien d’une améthyste, comme il avait toujours été supposé jusque-là. Un examen détaillé au microscope électronique révèle qu’il s’agit d’une composition en verre coloré, matériau de prédilection des orfèvres arabes de l’époque, mais totalement inconnu des scandinaves. Ensuite, plus étrange encore, l’inscription gravée se révèle être une calligraphie de style koufi. Une fois déchiffrée, les chercheurs peuvent lire les mots “il-la-lah”, ce qui signifie “Pour/à Allah”.

Comment une femme viking du 9e siècle a-t-elle pu se procurer un tel bijou ? Les archéologues n’ont pas la réponse. Pourtant, la découverte de cette simple bague pourrait bien nous obliger à repenser notre compréhension des relations entre le monde musulman et les Vikings, et nos connaissances en histoire médiévale par la même occasion. Se pourrait-il que les vikings aient pu entretenir des liens avec le califat abbasside, qui a dominé le Maghreb et le Moyen-Orient entre 750 et 1258 ? Quoi qu’il en soit, cette bague en argent est l’unique objet trouvé dans cette région du globe permettant d’établir un lien entre ces deux mondes au 9e siècle.

Le fait que la bague ne présente aucun signe d’usure laisse penser qu’elle n’aurait eu qu’un nombre réduit de propriétaires – si tant est qu’elle en ait eu plus d’un. Il se peut donc qu’elle ait été le fruit d’un échange avec un commerçant arabe. L’un des auteurs de l’étude n’hésite d’ailleurs pas à aller un cran plus loin, déclarant qu’il “n’est pas impossible que la femme elle-même, ou l’un de ses proches, ait visité – voire même soit né(e) – sur les terres du califat abbasside”.

Après tout, si les Vikings ont marqué l’imaginaire collectif, c’est aussi bien pour leurs talents de guerriers que pour leur prouesses de grands voyageurs comme le reflète très bien les textes des sagas. Si au terme de longues traversées en mer, ces derniers ont pu découvrir l’Islande, le Groenland et même l’Amérique dès le 11e siècle, rien ne nous dit qu’ils n’ont pas pu atteindre les côtes de la méditerranée abbasside, voire même Bagdad, quelques deux cents ans plus tôt.

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