Caricature en Iran : entre concours internationaux, propagande et censure

 Alors que les médias du monde entier applaudissent l’initiative de l’Iran de lancer un Concours international de caricatures de Daesh, la majorité des dessins mis en avant par l’agence de presse du pays servent le discours politique du régime et des caricaturistes iraniens continuent de se faire condamner.

Affiche du premier Concours international de caricatures de Daesh. (Maison de la bande dessinée d'Iran)
 Affiche du premier Concours international de caricatures de Daesh. (Maison de la bande dessinée d’Iran)

Après avoir lancé en début d’année la seconde édition du Concours international de caricatures sur l’Holocauste – la première édition en 2006 avait été vivement critiquée –, la Maison iranienne de la bande dessinée alimente de nouveau la polémique en lançant le premier Concours international de caricatures de l’État islamique afin d’« exposer les atrocités et la vraie nature de Daesh ». Financé par la municipalité de Téhéran, le concours lancé il y a quelques mois aurait reçu 800 caricatures de 40 pays différents. Le jury en aurait sélectionné 280 dont certaines seront exposées dans des galeries de la capitale iranienne. Les vainqueurs seront annoncés le 31 mai.

Dans une interview à la télévision d’État iranienne, Seyed Masud Shojayi Tababaei, président de la Maison de la bande dessinée et organisateur du concours, a déclaré que la compétition était séparée en deux catégories. « Dans la catégorie principale, nous nous sommes concentrés sur le groupe terroriste Daesh et ses soutiens occidentaux, arabes et juifs ». Tababaei a ajouté que la seconde catégorie regroupait les caricatures des personnalités qui soutenaient les militants de l’EI. Cette section présente les portraits de leaders mondiaux tels que Barack Obama, François Hollande, Benjamin Netanyahu et le roi Salman d’Arabie Saoudite.

(photo Maison de la bande dessinée d'Iran)
(photo Maison de la bande dessinée d’Iran)

Les organisateurs du Concours international de caricatures de l’État islamique # – soutenu par le gouvernement iranien – semblent mettre particulièrement en avant les dessins qui reflètent les opinions politiques du régime de Khamenei. Un certain nombre de caricatures relayées par l’Agence de presse de la République islamique pointent par exemple du doigt le rôle présumé des États-Unis et d’Israël dans la montée de l’État islamique.

(photo Maison de la bande dessinée d'Iran)
(photo Maison de la bande dessinée d’Iran)

Ce n’est pas la première fois qu’un concours de caricatures international organisé par la Maison de la bande dessinée iranienne fait polémique. En 2006, lors de la première édition du concours de caricatures sur l’Holocauste, les dessins récompensés affichaient clairement un caractère négationniste. La seconde édition lancée en début d’année, neuf ans après la première, représentait d’ailleurs une réponse directe aux attentats de Charlie Hebdo et aux caricatures de Mahomet publiées par le journal satirique. S’adressant aux potentiels participants, les organisateurs avaient déclaré : « Si l’Occident pense que la liberté d’expression n’a pas de limite, alors pourquoi ne laissent-ils pas les historiens et les experts faire de vraies recherches sur l’Holocauste ? »

Les participations à ce concours avaient par ailleurs dû être soumises avant le 1er avril parce que : « le 1er avril est le jour des gros mensonges et l’Holocauste est un gros mensonge inventé par les sionistes pour supprimer les Palestiniens », avait déclaré Tababaei.

La République islamique d’Iran organise couramment des concours de caricatures internationaux par le biais de sa Maison de la bande dessinée, et ce alors même que ses autorités condamnent régulièrement des caricaturistes pour avoir dépeint de manière négative le régime. L’artiste et militante iranienne Atena Farghadani a été trainée en justice la semaine dernière au motif qu’elle avait « insulté des membres du parlement par le biais de peintures ». La dessinatrice avait réalisé l’année dernière une caricature représentant des membres du parlement en animaux votant pour une loi restreignant l’accès à la contraception.

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