Asie : L’air pur, nouveau marqueur social ?

Comme chaque vendredi sur 8e étage, nous vous proposons « l’improbable ». L’idée : gratter le vernis anecdotique d’une information qui pourrait à première vue prêter à sourire pour en révéler des aspects que nous considérons dignes d’intérêt. Cette semaine, en route vers l’Asie où la pollution atmosphérique est en train de transformer l’air pur, de plus en plus rare, en marqueur social…

Shanghai. (photo flickr/Gary Craig)
Shanghai. (photo flickr/Gary Craig)

Le luxe : s’emplir les poumons d’un air pur et non vicié en intérieur. En Inde, certaines écoles privées de Delhi, gigantesque ville du nord du pays, n’hésitent plus à s’en servir comme d’un argument marketing. L’objectif étant de convaincre les élites locales et les riches expatriés d’y inscrire leurs enfants, comme nous l’apprenait en janvier dernier un article du quotidien américain The New Yorker. En effet, se débarrasser de ce mal indolore que constitue la pollution atmosphérique a un coût non négligeable, et certains établissements n’hésitent plus à le facturer à ceux qui peuvent se le permettre. Ce faisant, ils sont en train de transformer, pas à pas, l’air pur en produit de consommation, voire en marqueur social.

Bien sûr, la pollution de l’air ne touche pas uniquement les grandes villes du sous-continent. À quelques milliers de kilomètres de là, Shanghai, la ville la plus peuplée de Chine, voit se multiplier les hôtels qui se vantent de la qualité de leur air. C’est par exemple le cas du Cordis, un établissement hôtelier de luxe qui entend bien se distinguer de la concurrence par son emplacement, sa piscine, mais également son air doublement filtré dans ses 396 chambres, également toutes équipées d’un appareil pour mesurer la pollution, nous apprenait fin mars le Guardian.

Ce ne sont pas les exemples qui manquent. En Asie, l’air pur devient une denrée rare que l’on n’hésite plus à monétiser dans les mégalopoles comme Shanghai, Pékin ou Delhi. Vivre dans la pollution sera-t-il bientôt un problème de pauvre ? Il est permis de se poser la question — ce que fait d’ailleurs depuis 2009 une équipe de chercheurs de l’École des hautes études en santé publique (EHESP).

Pour rappel, l’OMS a quantifié les divers effets à court et à long terme de la pollution atmosphérique sur la santé. Il est estimé qu’en milieu urbain, elle accroît le risque de maladies respiratoires aiguës (par exemple de pneumonie), mais aussi chroniques (cancer du poumon, par exemple) ou encore de maladies cardio-vasculaires. Selon l’OMS, en 2012, près de 6,5 millions de décès (environ 11,6% du total des décès dans le monde) auraient été associés à la pollution de l’air extérieur et intérieur à l’échelle mondiale.

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