Une bonne fois pour toutes, combien y a-t-il de pays dans le monde ?

À voir défiler tous ces drapeaux lors de la cérémonie d’ouverture des JO de Pyeongchang en Corée du Sud, peut-être vous êtes-vous demandé combien de pays y participaient. La réponse : 82 nations… mais pour 92 comités olympiques (enfin 93 en comptant les deux Corées). C’est-à-dire un peu moins de la moitié des 206 Comités nationaux olympiques reconnus par le Comité international olympique (CIO). Comment peut-on arriver à de tels nombres alors que l’Organisation des Nations unies (ONU) ne dénombre, elle, que 195 pays, me direz-vous ? La réponse à cette question, et à d’autres, dans cette chronique tout en cartes.

(photo Nations Unies/Joao Araujo Pinto)
(photo Nations Unies/Joao Araujo Pinto)

Combien y a-t-il de pays dans le monde ? Au premier abord, cette question peut paraître d’une simplicité enfantine. Pourtant, impossible d’y apporter une réponse précise. En effet, un simple nombre ne suffit pas à raconter l’histoire complexe qui se cache derrière cette interrogation naïve.

La première question à se poser afin d’aborder ce sujet sereinement est peut-être « qu’est-ce qu’un pays ? ». Selon la définition du Larousse, il s’agit du « territoire d’une nation délimité par des frontières et constituant une entité géographique ». Cependant, cette appellation demeurant relativement vague, l’Organisation des Nations Unies (ONU) préfère, elle, celles d’États souverains, appellation qui désigne un espace géographique qui possède une population permanente, un territoire déterminé, un gouvernement qui n’est subordonné à aucun autre, ainsi qu’une capacité d’entrer en relation avec les autres États. Pourtant, malgré l’existence de ces critères, il reste encore une certaine marge d’interprétation, qui aura engendrée une multitude de désaccords.

Quoi qu’il en soit, de nos jours, l’ONU recense 195 États souverains dans le monde, dont 193 membres et deux États non membres ayant le statut d’observateurs (la Palestine et le Vatican). Ils sont visibles sur la carte ci-dessous :

Les pays membres de l'ONU en fonction de leur année d'adhésion. cliquez pour agrandir (Crédit : Roke [GFDL or CC-BY-SA-3.0], depuis Wikimedia Commons)
Les pays membres de l’ONU en fonction de leur année d’adhésion.
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(Crédit : Roke [GFDL or CC-BY-SA-3.0], depuis Wikimedia Commons)

Ces pays en couleur sont ceux les plus communément acceptés par les autres comme des États souverains. La légende, très claire, indique la date d’adhésion à l’ONU. Ce sont eux que l’on voit généralement revenir sur les cartes du monde et les listes de pays. Les deux dernières additions en date sont celles du Soudan du Sud, en 2011, et de la Palestine — qui reste encore très controversée —, devenue un observateur officiel en 2012.

Il faut souligner l’absence d’un certain nombre de territoires que beaucoup de Français ont tendance à désigner instinctivement comme des pays. Exemple type : Taïwan, dont l’indépendance n’est reconnue ni par la Chine ni par le Vatican. Dans la même région, on peut également penser à l’exemple du Tibet, qui est bien officiellement et dans les faits une région de Chine.

Les États partiellement ou non reconnus internationalement. cliquez pour agrandir (Crédit : Recognition_problems_Barry_Kent.png: Robert Wielgórski (User:Barry Kent)derivative work: EmilJ (Recognition_problems_Barry_Kent.png) [CC BY 2.5, CC-BY-SA-3.0 or GFDL], depuis Wikimedia Commons)
Les États partiellement ou non reconnus internationalement.
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(Crédit : Barry Kent [CC BY 2.5, CC-BY-SA-3.0 or GFDL], depuis Wikimedia Commons)

Les choses se compliquent légèrement avec la carte ci-dessus qui recense les États partiellement ou non reconnus internationalement. Comme vous pouvez l’observer, il existe plusieurs pays ne faisant pas partie de l’ONU, mais ayant tout de même obtenu la reconnaissance d’au moins un État reconnu par l’ONU. Ils sont ici représentés en orange et se révèlent être au nombre de six : Taïwan (République de Chine de son nom officiel), le Sahara occidental (de son nom officiel République arabe sahraouie démocratique), le Kosovo, l’Ossétie du Sud, l’Abkhazie et enfin la République turque de Chypre du Nord. Il est important de préciser que la totalité de ces territoires sont revendiqués par d’autres pays, mais ils ne sont pas contrôlés par ces derniers (en tout cas pas dans leur totalité). Le nombre de membres de l’ONU les reconnaissant varie fortement, allant d’un seul, dans le cas de la République turque de Chypre du Nord uniquement reconnue par la Turquie, à plus d’une centaine pour le Kosovo.

Notre carte indique également en vert des États qui bien qu’étant membres de l’ONU, ne sont pas reconnus par au moins un autre membre. C’est ainsi le cas de la République d’Arménie, qui n’est pas reconnue par le Pakistan, en partie parce que ce dernier a pris le parti de soutenir la République d’Azerbaïdjan lors de la guerre du Haut-Karabakh ; de la Chine (République populaire de Chine de son nom officiel), qui n’est pas reconnue par 21 États membres de l’ONU ; de la République de Chypre (que l’on connaît mieux sous le nom de Chypre), qui, sans surprise, n’est pas reconnue par la Turquie ; de l’État d’Israël, qui n’est pas reconnu par 21 États membres de l’ONU ; de la Corée du Nord, qui n’est pas reconnue par plusieurs membres de l’ONU, dont les États-Unis, le Japon, la France, l’Estonie ainsi que la Corée du Sud ; et de la Corée du Sud, qui en retour n’est logiquement pas reconnue par la Corée du Nord.

La carte indique également en rose les États reconnus uniquement par des États non-membres de l’ONU. On en dénombre deux ici : La République du Haut-Karabakh, mentionnée précédemment, et la République moldave du Dniestr (ou Transnistrie), petite enclave prorusse située en Moldavie. Enfin, en rouge apparaît l’unique État à n’être reconnu par absolument personne : la République du Somaliland, qui a déclaré unilatéralement son indépendance de la Somalie en 1991.

En résumé : En ajoutant à la liste de l’ONU les États partiellement reconnus, notre total se monte à 201 pays, 203 en y ajoutant les États reconnus uniquement par des États non-membres de l’ONU et 204 en y rajoutant le Somaliland.

Ajoutons également que depuis 2014, trois autres territoires pourraient, ou ont pu, potentiellement rejoindre le Somaliland. Tout d’abord en Ukraine, les Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk, qui pourraient bien devenir des États de fait sur le modèle de la Transnistrie une fois la guerre ouverte terminée, et l’Organisation de l’État islamique, qui ne contrôle plus à l’heure actuelle suffisamment de territoire pour pouvoir prétendre au statut de pays.

Enfin, rappelons également l’existence de micronations — qui jouent sur la confusion entre États et nations —, comme le Liberland, dont nous vous avons déjà parlé à plusieurs reprises sur 8e étage. Pour rappel, si elles sont plus de 400 à prétendre au statut de nation indépendante, ou à en présenter certaines caractéristiques, aucune d’entre elles n’est pas formellement reconnue comme telle par des nations officielles ou par des organismes transnationaux. Celle qui s’en rapprocherait le plus à l’heure actuelle serait certainement la Principauté de Sealand.

Rappelons enfin qu’en matière de droit international, nul n’a le droit de traverser une frontière sans passeport ou document d’identité émis par un État reconnu par l’ONU. Ainsi, dans la pratique, les résidents des entités mentionnées ci-dessus ont besoin de posséder un passeport de l’un des États reconnus par l’ONU s’ils veulent pouvoir voyager. Résultat : les ressortissants de la République turque de Chypre du Nord voyageront généralement grâce à un passeport turc. Ceux d’Abkhazie, d’Ossétie du Sud ou encore de Transnistrie grâce à un passeport russe — tout comme ceux des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk.

Carte des 206 Comités nationaux olympiques reconnus par le CIO. cliquez pour agrandir (Crédit : &Political Geography Now)
Carte des 206 Comités nationaux olympiques reconnus par le CIO.
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(Crédit :  Political Geography Now)

En cette période Jeux olympiques d’hiver, il est intéressant de remarquer que les événements sportifs internationaux majeurs ont aussi leur propre manière de compter les pays, comme nous le rappelle l’excellent site d’information Political Geography Now.

La carte ci-dessus recense les 206 Comités nationaux olympiques (CNO) reconnus par le CIO. Comme vous pouvez le constater sur la carte, il existe cinq associations continentales des comités nationaux : en Europe, les Comités olympiques européens (COE ou EOC) ; en Amérique, l’Organisation sportive panaméricaine (PASO) ; en Afrique, l’Association des comités nationaux olympiques d’Afrique (ACNOA) ; en Asie, le Conseil olympique d’Asie (COA) ; et enfin les Comités nationaux olympiques d’Océanie (CNOO) en Océanie.

Comment expliquer ce nombre ? Tout simplement, car les Olympiades ne demandent pas à leurs participants d’être officiellement des pays indépendants. Ainsi, des territoires autonomes ou semi-indépendants ont parfois été acceptés par le CIO — dont un certain nombre ont déjà été mentionnées un peu plus haut.

C’est par exemple le cas de la Palestine, seul État non membre observateur à l’ONU à y participer — le Vatican n’ayant jamais montré le moindre intérêt —, mais aussi du Kosovo et de Taïwan, deux États non membres de l’ONU, mais reconnus par des pays membres. Remarquons que Taïwan y participe systématiquement sous le nom de Taipei chinois, à la suite d’un accord trouvé avec la Chine.

Se rajoutent à ces pays plusieurs territoires d’outre-mer américains (comme Puerto Rico), ou britanniques (comme les Bermudes), mais aussi les Îles Cook, une monarchie parlementaire en libre association avec la Nouvelle-Zélande — à l’instar de Niue, ou encore l’île néerlandaise d’Aruba, dans les Caraïbes.

On se retrouve ainsi avec 92 comités olympiques (93 en comptant les deux Corées qui ont participé dans le cadre d’une épreuve en tant qu’équipe unifiée), pour 82 nations prenant part aux Jeux olympiques d’hiver en Corée du Sud.

Les pays reconnus par la FIFA. cliquez pour agrandir (Crédit :  Political Geography Now)
Carte des 209 fédérations nationales reconnues par la Fifa.
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(Crédit :  Political Geography Now)

Pour terminer cette chronique, nous mentionnerons encore une dernière organisation sportive internationale. Comme vous pouvez le constater, la carte ci-dessus indique les pays reconnus par la Fédération internationale de football association (Fifa), qui est, rappelons-le, la fédération sportive internationale du football, mais aussi celle du futsal et du football de plage. Les plus grands fans de football (ou soccer en Amérique du Nord) sauront peut-être que la Fifa compte 211 fédérations nationales affiliées — soit cinq de plus que le CIO. Pour l’anecdote, rappelons tout d’abord que la Fifa, née en 1904 de la réunion de sept fédérations européennes, est en réalité plus ancienne que l’ONU elle-même.

Comme vous pouvez le constater sur la carte, ces fédérations nationales sont regroupées au sein de six confédérations : l’AFC pour l’Asie, l’UEFA pour l’Europe, la CAF pour l’Afrique, la CONMEBOL pour l’Amérique du Sud, l’OFC pour l’Océanie et enfin la CONCACAF pour l’Amérique du Nord, l’Amérique Centrale et les Caraïbes.

À l’instar du CIO, la Fifa n’a pas toujours exigé de ses membres qu’ils soient des États indépendants ou qu’ils bénéficient d’une reconnaissance internationale. Au fil des années, les règles se sont néanmoins durcies — depuis 2008, une reconnaissance de l’État par l’ONU est théoriquement nécessaire pour pouvoir devenir membre de la Fifa. Cependant, pas de rétroactivité, l’organisation a inscrit dans son règlement que tous les pays ayant été acceptés ont le droit de rester membres.

En 2016, la Fifa a accepté ses deux derniers membres : le Kosovo, qui a pu y accéder après un vote en sa faveur par 141 membres de la FIFA sur 164, et Gibraltar, admis à la suite d’un vote par 172 voix contre 12.

À noter que les quatre nations constitutives du Royaume-Uni, l’Angleterre, l’Écosse, le Pays de Galles et l’Irlande du Nord, ou « home nations », ont été acceptées sans posséder leur autonomie politique, et ce en raison de leur « lien intime avec l’histoire du football européen ». La Fifa compte aussi parmi ses membres onze îles des Caraïbes dépendant des États-Unis ou du Royaume-Uni (Bahamas, Îles Vierges, Caïmans, etc.), mais aussi deux territoires français (la Nouvelle-Calédonie et Tahiti), qui bénéficient d’un accord spécial avec la France, les Îles Féroé, qui bénéficient elles d’un accord similaire avec le Danemark, ainsi deux territoires chinois (Hongkong, Macao), deux territoires étasuniens (Guam, Samoa), Taïwan et enfin la Palestine, pour qui chaque rencontre internationale continue d’avoir le potentiel de se transformer en cauchemar logistique…

À l’inverse, soulignons également qu’à part l’absence logique du Royaume-Uni, neuf États reconnus par l’ONU ne font pas partie de la Fifa — il s’agit de micro-États océaniens (Kiribati, Micronésie, Iles Marshall, Nauru, Palau et Tuvalu) et européens (Vatican, Monaco) n’ayant pas de prétention sportive.

Le sujet vous intéresse ? Nous vous invitons à consulter directement le site de l’ONU pour en savoir plus sur son fonctionnement et ses États membres. Enfin, pour les amateurs de cartes (et de géopolitique) anglophones, nous vous recommandons chaudement de consulter le très bon site de  Political Geography Now. Bonne lecture.

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