Une allocation versée à tous, du berceau à la tombe, de manière inconditionnelle et universelle, sans conditions de ressources ni obligation de travail ? Une idée à première vue utopiste et démesurée après une crise financière dévastatrice. C’est pourtant ce que proposent de plus en plus d’économistes, chercheurs et activistes, appuyés par des mouvements qui cherchent à instaurer le projet en France par le biais de l’Europe.
Il n’est rien au monde d’aussi puissant qu’une idée dont l’heure est venue”, peut-on lire sur le site du Mouvement Français pour un Revenu de base (MFRB). Cette phrase de Victor Hugo résume la pensée des militants pour l’instauration d’un revenu de base, une allocation versée à tous les citoyens, qu’ils soient riches ou pauvres, majeurs ou mineurs, avec ou sans emploi, et le tout, sans contrepartie.
Autour de 400 € pour les uns et de 750 € pour d’autres, le revenu de base, également appelé « allocation universelle », « revenu d’existence » ou « basic income », aurait pour but principal d’éradiquer l’extrême pauvreté et les inégalités. Il se substituerait aux nombreuses prestations sociales en cherchant à simplifier un système complexe, tout en évitant la création de trappes de pauvreté.
Plusieurs approches s’entrecroisent quant à son financement. Les principales comprennent une fusion des systèmes d’aide sociale, de chômage et de retraite, ainsi qu’un impôt proportionnel qui remplacerait le système actuel du RSA, de la prime pour l’emploi et des exonérations de cotisation patronale. L’Association pour l’Instauration d’un Revenu d’Existence (AIRE) met également en avant une redistribution de 14 % du PIB à tous les Français, soit le montant du capital social collectif (autrement dit, les richesses primaires d’un pays acquises par le travail des générations antérieures).
« Une révolution au niveau de la redistribution des revenus », estime Jacques Berthillier, le secrétaire général de l’AIRE. Instaurer un revenu de base, « c’est créer un nouveau droit et donner la perspective d’un modèle économique à long terme, parfaitement cohérent avec les contraintes sociales actuelles », ajoute-t-il.
Un débat qui prend de l’ampleur
Aujourd’hui, l’idée paraît en effet plus que jamais d’actualité. L’Unconditional Basic Income Europe (UBIE), un réseau d’associations et d’individus issus de 25 pays européens visant à promouvoir le revenu de base, vient d’être créé le 10 avril dernier, au Comité économique et social Européen à Bruxelles. Il est le fruit d’une initiative citoyenne européenne, qui, entre janvier 2013 et janvier 2014, a cherché à réunir le million de signatures nécessaires pour inciter la Commission européenne à rédiger des propositions d’actes juridiques sur le revenu de base. Si l’initiative n’a réuni que 300,000 signatures, elle a réussi à considérablement faire avancer le débat sur le concept à travers l’Europe, notamment par la création d’associations à travers ces 25 pays.
Parmi elles, le MFRB. Cette organisation, qui elle-même réunit différentes associations françaises, existe depuis mars 2013. Entre conférences, débats et pétitions, le MFRB cherche surtout à instaurer un débat constructif et faire connaître le concept au grand public. « Le revenu de base a fait beaucoup de chemin depuis un an », explique Camille Lambert, coordinatrice du mouvement. « Beaucoup plus de gens en ont conscience ou connaissent son concept », ajoute-t-elle.
Le revenu de base est pourtant loin d’être une idée récente. Il trouve ses toutes premières origines peu après la Révolution française, mais c’est surtout au 20e siècle que de nombreux économistes l’explorent, notamment à travers des expérimentations concrètes. Comme en Alaska, où depuis 1982, les habitants de l’État américain profitent de l’Alaska Permanent Fund, un fonds souverain annuel, tiré des rentes pétrolières et minières, redistribué à la population. En 1986, c’est la fondation du Basic Income Earth Network (BIEN), le réseau européen – puis mondial – du revenu de base, par les économistes Philippe Van Parijs, Yoland Bresson et Guy Standing, qui va contribuer à faire évoluer le débat au niveau global.
À tel point qu’en 2015, la Suisse sera le premier pays européen à voter par référendum sur l’instauration d’un revenu de base. « Il y a des chances qu’ils n’obtiennent pas la majorité, mais le peuple pourra se prononcer. Les politiques suisses seront ainsi obligés d’en débattre et ça fera certainement un effet tache d’huile au niveau européen », explique Jacques Berthillier. « Il est certain que si un pays européen valide le projet, les autres suivront vite », ajoute-t-il.
Une revalorisation du travail
Pourquoi un tel engouement aujourd’hui, presque 30 ans après l’apparition du concept ? Yoland Bresson, dans son livre Une Clémente Économie (2008), explique que « d’une façon ou d’une autre, inévitablement, l’organisation économique empruntera ce chemin sur lequel le revenu d’existence n’est que le premier pas ». Si ce chemin est peut-être en vue aujourd’hui, c’est parce que le revenu de base fait figure de solution miracle à de nombreux problèmes renforcés avec la crise financière de 2008 : vivre sans avoir peur du chômage, simplifier une administration souvent laborieuse, exercer une activité par choix et non par contrainte ou encore trouver une alternative à la recherche du plein emploi.
« Le revenu de base se justifie de tous les temps, mais il se justifie encore plus aujourd’hui parce que la crise n’est pas seulement économique, elle est aussi sociale et politique, » explique Camille Lambert du MFRB. « L’un des points les plus importants que met en avant le revenu de base est la réflexion autour du travail. Il s’agit de voir comment nous l’envisageons et s’il n’est pas plus intéressant aujourd’hui de revaloriser toutes les activités qui sont soit invisibles, soit méprisées, et qui pourtant font tourner le système. »
Un tel bouleversement du travail dans la société fait naturellement débat. Une des grandes critiques contre le revenu de base estime notamment qu’il créerait une société oisive. Si chacun touchait un même revenu garanti, on peut légitimement supposer que plus personne ne voudrait travailler. Mais un sondage effectué en Allemagne montre que 60 % des personnes interrogées répondent qu’elles continueraient de travailler si elles touchaient un revenu de base, 30 % travailleraient moins ou exerceraient une autre activité, et 10 % répondent : « D’abord, dormir, ensuite on verra. » Ce même sondage montre également que 80 % des personnes interrogées pensent que leurs concitoyens ne travailleraient plus.
De même, des expérimentations déjà menées dans plusieurs pays tels que la Namibie, l’Inde ou le Canada ont montré des résultats majoritairement positifs. Ainsi, en Namibie, un revenu minimum garanti de 10 euros a été distribué aux 1000 habitants d’un village pendant deux ans à partir de 2008. Le projet a réussi à faire baisser le chômage, la criminalité et l’absentéisme à l’école, tout en augmentant les revenus, la sécurité alimentaire et le nombre de microentreprises dans la région.
Une seconde grande critique adressée au revenu de base est l’inflation qu’elle pourrait engendrer suite à une hausse de la demande et donc des prix. Pour beaucoup de ses partisans, tout dépend de la manière dont il est financé. Un revenu de base trop élevé pourrait en effet entraîner un climat inflationniste, accorde-t-on du côté du MFRB. Mais selon Jacques Berthillier, « dans une économie de récession, on ne peut pas parler d’inflation dans la mesure où il y a 5 millions de chômeurs. Si les proportions de création monétaire sont relativement modestes par rapport au PIB, nous ne serons pas dans un climat inflationniste. »
Alors si le revenu de base est bien cette solution miracle aux maux de la société, pourquoi la politique semble-t-elle lui tourner le dos ? « Il est présent sous une forme ou une autre dans les tiroirs des partis, mais ils attendent le bon moment pour le sortir », estime Camille Lambert. Alors que des personnalités politiques très diverses telles qu’Éva Joly, Yves Cochet, Christine Boutin ou encore Dominique de Villepin ont déjà manifesté leur soutien au concept ou l’ont même inclus dans leur programme, le revenu de base pourrait bien faire partie des enjeux politiques et économiques des prochaines années.
Pour Jacques Berthillier, l’instauration d’un revenu de base est comparable au développement de l’écologie dans les années 1970. « Beaucoup voyaient ça comme une joyeuse utopie. C’est avec la pression de la base que les politiques se sont trouvés contraints de s’y intéresser. Le problème se pose de la même façon pour nous, » dit-il.
Actuellement, un groupe du BIEN agit auprès des députés européens pour qu’ils se positionnent sur cette proposition. En parallèle, le MFRB prépare sa première université d’été sur le revenu de base (du 21 au 23 août dans le Périgord) et espère pousser les politiques français à également se prononcer dessus.
Beau projet; une vie de chiotte pour tous; du communisme. Rêver d’être normal; rêver de vivre comme un cafard. Sincèrement pourquoi ne pas se faire
euthanasier à 7 ans, à l’âge de raison. Vraiment les prémisses d’une société de looser ou le suicide sera le plus beau moment de la vie.