La chronique « T’as pas 2 balles ? » explore les sites de financement participatif et leurs projets les plus fous pour tenter de comprendre à quoi ressemblera le monde de demain.
Avec « Maydan », l’ukrainien Dmitriy Berezhnoy et son équipe envisagent de recréer sous forme de jeu de société le mouvement Euromaïdan, le rassemblement pro-européen de Kiev entre la fin 2013 et le début 2014 qui a précédé les conflits actuels dans l’est de l’Ukraine.
Notre équipe de patriotes veut montrer à tout le monde que chacun décide de son propre destin et que le futur dépend entièrement de nous », c’est ainsi que Dmitriy Berezhnoy résume la raison qui l’a poussé à lancer son projet assez particulier de jeu de société sur Kickstarter, où il tente de récolter plus de 20 000€ avant le 11 décembre.
« Maydan », du nom du mouvement sur la place de l’indépendance de la capitale ukrainienne qui a mené jusqu’à la destitution du président Viktor Ianoukovytch le 22 février dernier, est un jeu de stratégie auquel un à quatre joueurs peuvent participer. Ces derniers doivent utiliser leurs « capacités sociales et coopératives pour réunir des personnes à l’esprit patriotique et renverser le chef d’État », sobrement intitulé « Tyran ».
Pour faire face aux Berkout, ces anciennes unités spéciales de la police antiémeute ukrainienne aujourd’hui dissoutes, chaque joueur doit choisir de prendre le rôle d’un groupe parmi le mouvement radical de gauche Spilna Sprava ou les groupes d’extrême droite Svoboda, Secteur droit et l’UNA–UNSO. L’enjeu principal de la partie est de vaincre les Berkout et de prendre d’assaut le Rada, le parlement ukrainien.
Dmitriy Berezhnoy explique que pour gagner, les joueurs doivent coopérer pour évoluer à travers une carte fidèle à la place de l’indépendance et battre leur ennemi commun. « Les différents partis peuvent se combattre entre eux, mais cela mènera sans aucun doute à la victoire du gouvernement, et donc à la défaite » estime le créateur. Il ajoute que « la victoire dépend principalement des actions des joueurs et non des lancers de dés. La réaction du peuple peut être très différente selon ce que vous faites ».
Pour mettre l’opinion publique de son côté, il faut ainsi capturer des bâtiments, en détruire d’autres, « éliminer » des combattants ennemis et surtout en recruter un grand nombre dans son groupe. Chaque joueur débute en effet la partie avec trois « guerriers rebelles », trois « défenseurs rebelles » et un « destructeur rebelle », avant de pouvoir ensuite en embrigader d’autres sur les 112 pièces que compte le jeu et qui incluent aussi des « fous furieux » ou encore des « incendiaires ».
Alors que les manifestations ont fait plus d’une centaine de morts à Kiev pendant l’hiver 2013-2014 et que le conflit opposant les forces ukrainiennes et les forces séparatistes prorusses fait toujours plus de victimes dans l’est du pays malgré la signature d’un cessez-le-feu le 5 septembre, ce jeu de société clairement politisé peut sembler de très mauvais goût.
C’est peut-être la raison pour laquelle le projet n’a jusqu’ici récolté que 485 € sur les 20 000 visés.
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