Les Frères musulmans à la conquête des pays scandinaves

Le ministère suédois de la Défense accuse les Frères musulmans de vouloir intégrer les organisations civiles du pays afin d’y mettre sur pied « une société parallèle », d’après des informations recueillies par Elaph, le premier site d’informations indépendant en arabe.

(photo Flickr/LASZLO ILYES)
(photo Flickr/LASZLO ILYES)

« La posture des pays européens vis-à-vis de la communauté des Frères musulmans n’est plus la même », a déclaré l’Agence pour la protection civile, une composante du ministère de la Défense suédois. Une déclaration qui fait suite à la publication d’un rapport, commandé par l’Agence, portant sur la présence d’islamistes en Suède. Il y est notamment écrit que « les Frères musulmans travaillent secrètement avec des islamistes et que leurs multiples organisations visent en fait à intégrer la société civile suédoise, par des institutions ou des partis politiques ».

L’équipe de recherche a par ailleurs affirmé que l’organisation cherchait à s’attirer les faveurs de gouvernements et de partis politiques européens par le biais de slogans trompeurs évoquant les Droits de l’homme et la démocratie.

Des méthodes qui fonctionnent

Gamal Heshmat, membre haut placé de l’organisation chargée des relations de la communauté avec la Scandinavie, a d’ailleurs fait savoir que des rencontres avec des fonctionnaires officiels du Parlement norvégien et du ministère des Affaires étrangères avaient bien eu lieu. Une réunion avec des dirigeants d’Amnesty International s’est aussi déroulée. À la suite de ces entrevues, il a publié sur sa page Facebook : « Ma visite en Scandinavie a été un succès, j’y ai notamment présenté des documents prouvant le caractère illégal du coup d’État égyptien ». Il évoque ici la chute du président Morsi le 3 juillet 2013 précipitée par le général Al Sissi, devenu depuis président de la République d’Égypte.

Le cheikh Nabil Naïm, spécialiste des organisations islamistes, explique que « la confrérie a une présence très forte en Europe, notamment par l’intermédiaire de ses membres salafistes vivant en Suède, en Norvège, au Danemark et en Finlande ». Il précise que « l’organisation perçoit des dons conséquents provenant de cette région d’Europe. Elle cherche avant tout à intégrer ces pays au nom de l’Islam et des Droits de l’homme, en essayant de générer l’empathie de la population scandinave et ainsi de récolter de l’argent ». Àn effet, selon lui : « La Suède et les autres pays scandinaves ont commencé à alerter sur le danger que représente l’organisation qui utilise souvent la violence à des fins politiques ».

Des associations soupçonnées de relayer la philosophie de la confrérie égyptienne

Anila Suder, la responsable des opérations au sein de l’Agence de protection civile suédoise, a déclaré dans un communiqué de presse que ce rapport n’était « qu’une première évaluation de la situation et que l’Agence avait besoin de continuer ses recherches ». Constitué de trente-cinq pages, il affirme qu’il existe de nombreuses associations islamiques liées à la confrérie. Ces dernières travailleraient à la construction d’une société parallèle en Suède, dont les valeurs diffèrent des coutumes suédoises.

Le rapport dresse aussi une liste de quatre grandes associations établies en Suède qui seraient en lien direct avec l’organisation égyptienne : Islamic Relief Worldwide, l’Association Ibn Rushd pour l’Éducation, l’Association des jeunes musulmans de Suède, et l’Association islamique — qui serait le nouveau nom d’usage des Frères musulmans dans le pays.

Le document appelle également à la création d’un système de collecte d’informations, et ce afin de mieux comprendre les actions engagées par la confrérie. Il souligne enfin que les Frères tenteraient d’augmenter le nombre de leurs partisans en Suède, en intégrant les vagues de migrations en provenance du continent africain et du Moyen-Orient, tout en exerçant leur influence au sein des communautés de réfugiés.

Omar Mustapha, qui dirige l’Association islamique en Suède, a rétorqué que « son organisation est une association d’action civique, qui n’a aucun lien avec les Frères musulmans ». On peut néanmoins lire sur le site de l’Association que son président voue « une fidélité totale au chef spirituel Youssouf Al Qaradawi ». Problème : ce théologien égyptien est connu pour être un acteur majeur de la propagation des idées de la confrérie dans le monde, notamment à travers l’Organe intellectuel des Frères musulmans en Occident qu’il dirigeait.

On peut enfin y lire que « les revendications de l’Association, qui compte 70 000 membres en Suède, sont inspirées de celles des Frères musulmans, de par les valeurs communes que nous partageons. L’association ne dépend cependant pas de la confrérie ».

Un dirigeant controversé

L’Association a déjà créé la polémique par le passé, par le biais de son ancien dirigeant, Mohammed Al Dabahi. En avril 2006, l’homme avait fait parvenir une lettre aux différents partis politiques suédois. Il y demandait des droits spécifiques pour les étudiants musulmans, en leur permettant par exemple de s’exempter de la loi suédoise portant sur le divorce.

Bien que le rapport l’ait présenté comme « un écrivain musulman basé en Suède », il précise que « l’Association islamique de Suède, basée à Stockholm depuis 1980, est dirigée par les Frères musulmans. Elle incarne une institution centrale, composée de quarante associations musulmanes travaillant dans le secteur de l’éducation, possède la grande mosquée de Stockholm et supervise celle de Göteborg, deux des plus grandes du pays ».

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