Plusieurs projets visent à faire renaître ce gigantesque bovin disparu au XVIIe siècle.
Un Jurassic Park – version soft – ça vous tenterait ? Si les scientifiques n’ont pas encore réussi à ressusciter les dinosaures, certains s’exercent sur d’autres espèces disparues, et notamment sur ce gigantesque taureau qu’était l’aurochs, dont le dernier est mort un peu avant 1630 en Pologne.
Une équipe composée d’écologistes, d’historiens, de généticiens et d’éleveurs de bétail tente de redonner vie à cette bête haute de plus de deux mètres de haut au garrot. Le projet, dénommé “Tauros”, est né en 2008, rapporte le
Washington Post, et avance pas à pas.
Pas question de clonage ici, mais simplement de croisements entre des bêtes minutieusement sélectionnées pour leur ressemblance avec l’aurochs. « Les scientifiques ont identifié des élevages de bétail qui partagent les caractéristiques de leurs ancêtres les aurochs : une large stature, de longues pattes, une carrure mince et athlétique, des cornes courbées, une fourrure noire pour les mâles et d’un brun rougeâtre pour les femelles », décrit-on dans le journal. Grâce à l’os du fémur d’un aurochs vieux de 6700 ans retrouvé en 2014, les scientifiques ont pu séquencer l’ADN de l’animal disparu, ADN qu’ils pourront comparer avec celui des espèces qu’ils obtiennent actuellement à travers leurs élevages sélectionnés. Mais deux ADN proches ne signifient pas que deux animaux appartiennent à la même espèce, rappelle notamment Valerius Geist, professeur de science environnementale, en faisant allusion à l’homme et au chimpanzé.
Ce n’est pas la première fois que l’on cherche à ressusciter ce taureau qui errait autrefois en Europe et en Asie. Un peu avant la Seconde Guerre mondiale, les Nazis ont eux aussi tenté de recréer cette vache « aryenne », en faisant appel à deux frères zoologistes, Heinz et Lutz Heck. Une tentative qui se solda par un échec, résume Courrier International :
Il est aujourd’hui admis que les vaches de Heck […] étaient en réalité très éloignées de l’aurochs, et que les deux frères n’avaient réussi qu’à créer là un fac-similé de vache primitive.La génétique moderne a d’ailleurs établi de longue date l’impossibilité de reconstituer une espèce disparue.
Pourtant, c’est notamment avec des vaches de Heck que le Projet Tauros tente d’atteindre son but. Et les premiers résultats commencent à apparaître, à en croire Ronald Goderie, écologiste qui dirige l’expérimentation :
Ce que l’on voit déjà avec la deuxième génération, c’est que la couleur de l’animal ressemble beaucoup à celle de l’aurochs. […] Ils sont déjà plus hauts sur pattes. Ce qui est plus compliqué à obtenir, c’est la taille et la forme des cornes. […] Nous pensons que dans six ou sept générations, on obtiendra un groupe stable de bovins Tauros. Cela nous prendra encore sept à dix ans.
Des aurochs gambaderont-ils bientôt dans les prairies ? Pour certains spécialistes, cette hypothèse est peu crédible, et peut-être peu souhaitable. Manuel Lerdau, écologiste à l’université de Virginie, s’interroge sur l’impact de la résurrection d’une espèce sur son écosystème. D’autres, au contraire, militent pour la réintroduction des espèces disparues pour rééquilibrer l’environnement, note Ronald Goderie dans Modern Farmer :
On a démarré cette initiative car de grands troupeaux d’animaux brouteurs sont nécessaires pour préserver la biodiversité et les paysages ouverts européens.
D’autres projets semblables au sien existent, comme le projet néerlandais Uruz. Mais même parmi ceux qui prennent part à ces expérimentations, les doutes subsistent. Le généticien Richard Crooijmans est formel : « On ne ramènera pas à la vie les aurochs. On pourra seulement élever un animal semblable ».
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