Comme chaque vendredi sur 8e étage, nous vous proposons un article « WTF ». L’idée : gratter le vernis anecdotique d’une information qui pourrait à première vue prêter à sourire pour en révéler des aspects que nous considérons dignes d’intérêt.

Entre l’absurde et le génie, la frontière est parfois bien mince. Les Japonais viennent une nouvelle fois de le prouver en mettant au point un nouveau système destiné à éviter d’éventuelles collisions avec des animaux sauvages se trouvant sur les voies ferrées. L’idée est simple : diffuser à l’avant des trains des enregistrements de cris d’animaux le soir et la nuit, périodes où les cerfs et autres animaux sauvages sont le plus susceptibles de se trouver sur les voies, afin de les inciter à fuir, ainsi que le rapporte un récent article du Asahi Shimbun.
À l’origine de cette idée peu conventionnelle, on retrouve une équipe de l’Institut de recherche technique du chemin de fer (RTRI), la société de recherche technique sous l’égide de Japan Railways, basée à Tokyo. Comme l’explique la BBC, lors de phases de test, l’institut a pu constater que diffuser l’aboiement d’un chien ou le brame d’un cerf permet de réduire sensiblement le nombre de collisions sur les voies.
Pourquoi utiliser spécifiquement les cris de cerfs et de chiens ? Tout simplement, car les cerfs sont les animaux sauvages les plus susceptibles d’être heurtés par un train au Japon. Les chercheurs de la RTRI ont eu l’idée de diffuser de courts brames, semblables à ceux produits par ces animaux pour signaler à leurs pairs un danger imminent, immédiatement suivis d’aboiements de chiens, un animal qu’ils tendent à considérer comme un « ennemi » et dont la présence les fait immédiatement paniquer. Lors des phases de test, les trains ont donc diffusé en boucle un premier enregistrement, long de trois secondes, de brames, puis un second de vingt secondes d’aboiements.
Résultat : 45% d’animaux sauvages en moins auraient été aperçus depuis les trains, avec une moyenne de seulement 7,5 occurrences sur 100km. La RTRI explique continuer d’améliorer son dispositif. Elle envisage maintenant de le déployer sur l’ensemble du réseau ferré nippon d’ici la fin de l’année fiscale 2018, comme principal dispositif anticollision. Elle précise qu’elle développe également un appareil capable d’émettre automatiquement les cris d’animaux dans les zones où les cerfs sont le plus souvent présents. L’objectif étant aussi de s’assurer que le système ne se transforme pas en nuisance sonore pour les Japonais vivant à proximité des rails.
« Si notre engin fonctionne, cela rendra inutile la pose d’installation empêchant la traversée des rails à de nombreux endroits », explique un porte-parole de RTRI au Asahi Shimbun. « Nous espérons en faire un système qui fonctionne dans les zones montagneuses et ailleurs afin que les compagnies ferroviaires aient envie de les introduire [sur leur réseau] ».
Selon le ministère des Transports japonais, au cours de l’année fiscale 2016, 613 trains ont été annulés ou retardés d’au moins 30 minutes à cause d’une collision avec un cerf ou un autre animal sauvage. 185 collisions de plus que l’année précédente.
Sachez que les chercheurs de la RTRI ne sont pas les premiers à avoir eu l’idée de recourir à des cris d’animaux pour résoudre leurs problèmes. Ainsi, en Inde, des ingénieurs du son de Tollywood, le nom donné à l’industrie du cinéma indien, collaborent depuis 2015 avec des scientifiques du All India Network Project of Vertebrate Pest Management, une initiative qui vise notamment à protéger les cultures des animaux sauvages. Ils utilisent des techniques bioacoustiques et amplifient des cris de prédateurs, à l’instar de tigres, de léopards et de chacals, dans le but dissuader des sangliers de dévaster les récoltes.
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